dévots. Ceux, toutefois, qui n'ont aucune connaissance du service de dévotion pur demeurent incapables d'en percer le mystère.

Bhismadeva jouait le rôle d'un vaillant guerrier, et s'il transperça le corps du Seigneur, à tant de reprises qu'aux yeux du commun des hommes il semble l'avoir blessé, c'est intentionnellement, afin que les mécréants soient confondus. Car, le Corps du Seigneur, purement spirituel, ne saurait être blessé, ni un sage devenir l'ennemi du Seigneur. D'ailleurs, si Bhismadeva avait été vraiment l'ennemi du Seigneur, aurait-il désiré faire de Lui le but ultime de son existence ?

De plus, s'il avait été vraiment l'ennemi du Seigneur, Celui-ci aurait pu l'anéantir sans même un seul geste. Quel besoin alors d'apparaître devant Bhismadeva blessé et ensanglanté ?

Si le Seigneur choisit cette voie d'action, c'est afin d'accéder au désir qu'avait son dévot combattant de contempler sa beauté sublime, parée de blessures données par un sage pur. Voilà comment s'échangent les sentiments sublimes entre le Seigneur et son serviteur. Par de tels échanges, le Seigneur et le sage serviteur sont tous deux glorifiés, chacun selon sa position.

La colère du Seigneur était telle qu'Arjuna tenta de le retenir lorsqu'Il se rua sur Bhismadeva, mais en vain. Il courut vers son dévot, comme un amant vers son amante, sans souffrir aucun obstacle. En apparence, le Seigneur avait l'intention de tuer Bhismadeva; en réalité, Il voulait simplement faire la joie de son grand dévot. Les impersonnalistes prient le Seigneur de leur accorder la libération, et Lui qui sans nul doute est le libérateur pour toutes les âmes conditionnées, comble toujours leur désir; mais nous voyons ici Bhismadeva désireux par-dessus tout de rejoindre, à la fin de sa vie, le Seigneur dans sa forme personnelle, et c'est là l'aspiration de tous les sages purs.

Qu'à l'instant de la mort, mon attachement ultime soit pour Sri Krishna, Dieu, la Personne Suprême, Lui le conducteur du char d'Arjuna, Lui qui, splendide, les rênes dans sa main gauche et un fouet dans l'autre, veillait avec grand soin à parfaitement protéger son équipage. Tous ceux qui sur le champ de bataille de Kuruksetra moururent après l'avoir vu retrouvèrent leur forme spirituelle originelle.

Un sage pur perçoit constamment en lui la présence du Seigneur, cela parce qu'il Lui est uni dans une relation sublime à travers son service d'amour. Un tel sage ne peut oublier le Seigneur même pour un instant; c'est ce qu'on nomme la méditation. Le spiritualiste cherche à se concentrer sur l'Âme Suprême en maîtrisant ses sens, en les coupant de toute autre activité, et ainsi peut-il atteindre, au bout de ses efforts, l’extase; mais le sage obtient le même résultat avec beaucoup plus d'aise, en gardant sans cesse à l'esprit les traits personnels du Seigneur ainsi que son Saint Nom, sa renommée, ses divertissements, etc. Ainsi, la concentration du spiritualiste et celle de l’être saint se situent à des niveaux différents : celle du spiritualiste est purement