de fleurs qui pendait au cou du Seigneur touchait la poitrine des reines, leur corps tout entier se couvrait de jaune safran. Absorbées dans leurs divertissements célestes, les reines perdaient notion d'elles-mêmes, et leurs chevelures défaites ressemblaient aux ondulantes vagues d'une rivière. Lorsque Krishna et ses reines s'aspergeaient mutuellement, la scène rappelait les jeux aquatiques d'un éléphant et de ses nombreuses compagnes.
Comblés par ces plaisirs, les reines et Sri Krishna sortaient de l'eau et abandonnaient leurs vêtements mouillés, tous de grande valeur, aux chanteurs et danseurs professionnels. Ceux-ci, en effet, n'avaient d'autres salaires que les parures et riches vêtements laissés en de telles occasions par les rois et les reines, en guise de récompense. L'organisation de la société était si bien conçue que chacun dans sa position respective, fût-il guide spirituel, administrateur, commerçant ou ouvrier, n'avait aucun mal à gagner sa vie; aucune compétition n'opposait les classes sociales. Le système des castes originel était ainsi conçu qu'une classe d'hommes se livrant à une occupation spécifique ne rivalisait pas avec une autre d'occupation différente.
C'est ainsi que Sri Krishna aimait à se réjouir de la compagnie de ses 16 108 épouses. Les dévots du Seigneur qui désirent exprimer leur amour à Dieu, la Personne Suprême, à travers le doux sentiment amoureux sont élevés à la condition d'épouses de Krishna, et Dieu, Lui, les garde toujours attachés à sa Personne par son aménité. Le comportement de Krishna avec ses épouses, ses gestes, ses paroles, son sourire, son étreinte et ses autres agissements qui le rendaient semblable à un époux plein d'affection, les attachaient toujours davantage à sa Personne; et telle est la plus haute perfection de l'existence. Si quelqu'un demeure sans cesse attaché à Krishna, c'est qu'il a atteint la libération et la perfection de l'existence. Qu'un être saint aime Krishna de tout son cœur et de toute son âme, et celui-ci répond à son amour de sorte qu'il lui sera impossible de ne pas demeurer attaché à Dieu. Les échanges qui ont lieu entre Krishna et ses dévots exercent une telle fascination qu'un être saint n'aura d'autres pensées que Krishna.
Pour chacune des reines, Krishna était le seul Objet d'adoration. Constamment, elles demeuraient absorbées en la pensée de Krishna, la Personne Suprême aux yeux pareils-au-lotus et au corps couleur d'orage. Perdues dans la pensée de Dieu, elles restaient parfois silencieuses, puis, sous l'effet de l'extase sublime du bhava (émotion, sentiment, dévotion) et de l'anubhava (expression naturelle d’un état intérieur), elles se mettaient à parler comme prises de délire. D'autres fois, même en présence de Sri Krishna, elles décrivaient avec force détails les divertissements auxquels elles avaient eu la joie de se livrer avec Lui dans le lac ou dans la rivière.
C'est ainsi que toutes les épouses de Sri Krishna demeuraient parfaitement absorbées en la pensée du Seigneur. On tient Krishna pour Yogesvara, le Maître de tous les yogis, et c'est Lui que ses épouses gardaient en leur cœur, à Dvaraka. Au lieu d'essayer de maîtriser tous les pouvoirs surnaturels par la pratique du yoga, il est certes préférable de simplement garder en son cœur le Yogesvara suprême, Krishna,